Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
2 octobre 2014 4 02 /10 /octobre /2014 17:56
Les auteur(e)s de violence

Une femme rejoint son compagnon au restaurant . Elle est un peu en avance, et l’attend devant l’entrée. Elle voit son amoureux au loin s’avancer vers lui. Elle est heureuse. Elle lui sourit. Il ne réagit pas. Il lui décroche un sourire à quelques mètres d’elle. Quand il arrive, elle lui fait une crise « J’en ai marre. Faut toujours que tu m’humilies. Je te fais un sourire et tu me snobes…. ». Il ne réagit pas, se renferme et espère que cela va passer. Elle, pas du tout contente, en rajoute. Elle veut une réaction. Lui, bloqué dans le silence. Ils vont au restau, ambiance tendue. De retour à la maison, elle revient sur les faits. Elle a beau lui demander pourquoi il lui fait cela, il ne répond pas. Au bout d’un moment, elle craque et lui envoie sa brosse à cheveux à la figure. Il réagit et lui demande de se calmer. Elle ramasse autre chose et le lui lance. Elle le pousse ( et éventuellement lui frappe les épaules…) Et ainsi de suite pendant plusieurs dizaines de minutes voire une heure.

Un homme rentre chez lui un soir, fatigué de sa journée mais de bonne humeur. Il embrasse sa femme, il embrasse ses enfants et se repose un peu. Tout le monde passe à table. Il goute son plat et regarde sa femme et lui dit « tu as salé le plat ? ». Sa femme se contracte directement, ses yeux s’agrandissent et expriment l’effroi. Et la main part. Son mari vient de la gifler.

Un ado est tranquille dans sa chambre à jouer de la guitare. Ses devoirs sont terminés. Il a fini toutes les taches qu’il doit normalement faire. Sa mère entre et lui demande de faire quelque chose. Il fait oui oui. Et ne fait rien. Un ado, sans surprise !! Sa mère revient et insiste. Elle lui reproche de ne jamais rien faire et s’énerve. L’ado commence à répondre. La mère tente d’avoir gain de cause. Elle le prend par le bras pour le faire se lever. Il lui prend le bras et la repousse. Sa mère s’agite et il lui retourne une gifle.

Ces trois histoires sont vraies. J’ai rencontré soit la victime soit l’auteur de violence.

La violence n’a pas de sexe ni d’âge, n’est ni pauvre ni riche. La violence peut venir de partout et a des différentes formes. La violence est souvent cachée et entraine un sentiment très fort de honte pour celui qui la subit mais aussi pour celui qui la prodigue (à l’exclusion des profils psychiatriques tels que les pervers, les psychopathes….).

Un auteur de violence ne s’en prend pas forcément au plus faible. J’ai vu un homme 1m80, 90kg arriver à mon cabinet avec une lèvre fendue par sa femme d’1m60, 45 kg. La violence n’est pas liée à à la force physique et/ou psychologique.

En thérapie, pour aider un auteur de violence à mieux se maitriser, il faut commencer par regarder ce qui chez lui est douloureux. Il faut en fait voir en quoi il se sent victime de celui qu’il a frappé ou insulté. Les auteurs de violence passent à l’acte parce que, justement, ils se sentent vulnérables.

La violence a normalement une fonction défensive. C’est un mécanisme reflexe de défense. La violence est utilisée pour se défendre d’un danger réel qui met en péril son équilibre ou celui d’un proche. Quelqu’un rentre chez moi par effraction, j’ai cette réaction reflexe et même décuplée d’attaquer afin de paralyser le danger. Cette violence est normale et adaptée.

Or, aujourd’hui dans notre société, il est rare que l’on soit confronté à des dangers réels et pourtant la violence continue d’exister.

Pourquoi un individu réagit-il avec violence face à une situation anodine ? Parce que la notion de danger varie d’une personne à une autre. Ce qui fait sourire l’un est agressif pour l’autre. Prenons cet homme qui donne une gifle à sa femme parce qu’elle a salé un plat. De son point de vue, il a été agressé par sa femme. Parce qu’il manque de sécurité intérieure, parce qu’il a une difficulté profonde à intégrer qu’il est aimé et que sa femme le voit et l’aime réellement, il accorde de l’importance à des détails qui viendront lui prouver qu’il est en sécurité dans son couple.

Cet homme a un défaut de perception et, de fait, d’analyse de la situation. Il confond un fait anodin comme saler un plat avec une preuve d’amour. Pour lui, comme sa femme SAIT depuis très longtemps qu’il n’aime pas le sel, cela prouve que ce manquement a été dirigé CONTRE lui. Il n’a pas la capacité à prendre de la hauteur face à l’évènement. Si elle sait, c’est qu’elle ne le prend pas en compte et donc, elle ne l’aime pas. Sa tête explose, ses pensées se bousculent et il n’a plus la capacité à élaborer la situation. Il déborde émotionnellement ; Et le seul moyen qu’il a de retrouver un calme intérieur, c’est de rendre la violence qu’il a ressenti. Il y a une vraie volonté de faire mal et de rendre la douleur / le danger qu’il ressent mais en réalité, la victime n’est plus perçue comme une personne ; La victime n’est plus qu’un stimulus négatif dont on doit se débarrasser. Il veut faire mal au stimulus, à la cause de sa fouleur, pas à sa femme. Mais comme dans sa tête tout a explosé, ses idées ne lui permettent pas de distinguer l’être humain de la cause de sa douleur.

On voit bien qu’au départ ce sont les fondations insécures et les angoisses envahissantes qui provoquent la violence, pas le fait accusé.

En thérapie, les auteurs de violence apprennent à comprendre ce qui déclenche le sentiment qui déborde : la colère, la frustration, la haine, le désespoir, la persécution, l’abandon, ... Ils apprennent à trouver d’autres manières de gérer leurs émotions et à mieux verbaliser ce qui les dépasse. Par exemple, cet homme aurait pu commencer par relativiser et se dire que sur une échelle de 0 à 10, oublier de ne pas mettre de sel n’est pas important. Il apprendra aussi à comprendre que ce qui se cache derrière c’est sa peur d’être désaimé. Il peut alors commencer par demander à sa femme si cet oubli est l’expression d’une diminution de son amour, s’il est en DANGER dans son couple. Il apprendra à prendre en compte ses peurs et à mieux les maitriser et les élaborer. In fine, par cette exploration intérieure, il apprendra même à ressentir l’amour qu’il ne parvient pas à voir encore.

Les auteurs de violence souffrent énormément parce que malgré eux, ils détruisent tout, ce qui les enferme dans une honte. Cette honte d’être violent vient malheureusement renforcer son recours. Alors que le violent cherche à être aimé, ils éloignent les autres et s’isolent.

Si moi, psychologue, j’ai de l’empathie pour les auteurs de violence, je tiens à préciser que je ne l’approuve pas. Si moi, psy, je ne veux que les aider, et mieux comprendre pourquoi ils sont ainsi, j’encourage toutes les victimes à ne jamais se poser la question de pourquoi mais uniquement à regarder l’impact de cette violence sur elles, émotionnellement, affectivement, socialement, parentalement…. les victimes de violence ne peuvent réellement rien faire pour améliorer leurs situations, ce sont les auteurs qui doivent se soigner avec un professionnel. Ce n’est pas le job d’un(e) partenaire, ni d’un(e) ami(e). Le problème ne vient pas des victimes mais des auteurs qui intrinsèquement ne savent pas lire les messages et ont tendance à ne voir que ce qui renforce leur sentiment d’insécurité.

Il est illégal en France de frapper, insulter, menacer, harceler…. Seul le point de la légalité doit interpeller ; il n’existe aucune excuse légitime à avoir recours à la violence. L’auteur est excusable uniquement lorsqu’il commence ce cheminement de reconnaitre sa difficulté et de se faire soigner.

Une femme rejoint son compagnon au restaurant . Elle est un peu en avance, et l’attend devant l’entrée. Elle voit son amoureux au loin s’avancer vers lui. Elle est heureuse. Elle lui sourit. Il ne réagit pas. Il lui décroche un sourire à quelques mètres d’elle. Quand il arrive, elle lui fait une crise « J’en ai marre. Faut toujours que tu m’humilies. Je te fais un sourire et tu me snobes…. ». Il ne réagit pas, se renferme et espère que cela va passer. Elle, pas du tout contente, en rajoute. Elle veut une réaction. Lui, bloqué dans le silence. Ils vont au restau, ambiance tendue. De retour à la maison, elle revient sur les faits. Elle a beau lui demander pourquoi il lui fait cela, il ne répond pas. Au bout d’un moment, elle craque et lui envoie sa brosse à cheveux à la figure. Il réagit et lui demande de se calmer. Elle ramasse autre chose et le lui lance. Elle le pousse ( et éventuellement lui frappe les épaules…) Et ainsi de suite pendant plusieurs dizaines de minutes voire une heure.

Partager cet article
Repost0

commentaires